On
s'éclatait, les trois dernières de la file ! Au pas, comme on avait des
juments plutôt plan-plan, on les poussait pas trop, pour laisser de la
marge avec le reste du groupe, et une fois un peu éloignées, on lançait
nos filles au trot !
Et les juments, toutes ravies de retrouver les copains ! Nouvelle pause
broutage, et nouveaux petits conseils : Je tiens mes rênes trop
longues, au trot (encore une conséquence de ma crainte d'incommoder le
cheval : j'ai toujours les rênes trop longues
) et je me penche trop en avant. En fait, je m'aide de la crinière pour
le trot enlevé, mais je la prends trop bas, ce qui fait que j'ai du mal
à être droite. J'intègre les nouvelles consignes et c'est reparti !
Rênes plus courtes, et j'essaie de prendre la crinière plus haut, mais
c'est très difficile parce qu'isa secoue sans cesse la tête et se
frotte
sur son antérieure dès qu'on repasse au pas. Au point que j'en suis à
me demander si elle n'a pas pris quelque chose dans l'œil.On termine
notre "étape", et nouvelle pause broutage et explications. Vérification
des étriers, on les remonte un coup, et tout de suite, ça va mieux ! Le
cavalier de Nelfe m'a bien
fait rire en me montrant comme il faisait le tape-cul (il avait lui aussi ses étriers trop longs) pendant le trot enlevé !
Pendant que Fabrice m'aide à remonter mes étiers, je lui dit qu'Isa
secoue la tête et se frotte contre son antérieure. Il l'a regarde, et
me dit : "Oh, c'est rien, c'est sûrement les mouches qui l'embêtent,
elle est très expressive." Me voila rassurée !
Il retourne à son cheval et nous explique l'étape suivant : le galop !!!!!!!!! !
"J'ai mis quinze ans à trouver la bonne position au galop, alors je
compte bien que vous en mettiez autant !" XD Et là, je sais pas trop ce
qui s'est passé, faut dire que je le regardais nous montrer à reculer
la jambe droite, et d'un seul coup, Isa a couiné et a dégagé sur la
gauche, sans prévenir !
Je me suis retrouvée avec ma jument de face sur la pente du talus qui
longeait le chemin ! Sur les conseils de Fabrice, j'ai continué son
dégagement sur la gauche, on s'est retrouvées sur le chemin. Il avait
l'air de s'inquiéter, il m'a dit de respirer un grand coup, et avant de
repartir, il m'a encore demandé si ça allait, mais, moi, j'ai su à ce
moment que c'était gagné : Je n'avais pas eu peur. J'avais juste été
surprise, mais sans aucune peur. La raison ; j'avais confiance en Isa.
J'avais
oublié ce sentiment à cheval, depuis des années...En fait, je pense
que, pendant que nous écoutions et que les chevaux broutaient, le nez
d'Isa a du rencontrer le nez de Nelfe et qu'elles se sont disputé un
brin d'herbe, tout simplement ! Enfin, je sentais la victoire approcher
!
On est repartis et on a débouché sur un chemin bien droit, dégagé, le
long d'un champ, et...galop !!!!!!!!!!!!!!!!!! J'ai eu un peu de mal à
lancer Isa qui restait plus ou moins au trot, mais, d'un seul coup, les
saccades du trot ont disparu, pour laisser place à la sensation la plus
merveilleuse que j'aie jamais ressentie (je n'ai pas besoin de décrire,
vous savez de quoi je parle !
) ! Je devais avoir ma plus belle tête d'imbécile heureuse !
Mais personne ne me voyait. Accrochée à la crinière de ma jument, je
recevais à grandes gifles le vent de la liberté. au bout du champ, on
est tous repassés au trot. Aux questions de Fabrice, ne revenaient que
des "génial", "super !", j'ai du répondre quelque chose, mais je ne
sais plus quoi, ni si je l'ai dit assez fort pour qu'il m'entende.
J'étais tellement chamboulée par ce qui s'était passé en moi. Tous les
mauvais souvenirs, les mesquineries, les échecs, les blessures
s'étaient perdus dans le vent du galop d'Isa. A la place de la peur, il
ne m'est resté pendant, quelques instants, qu'un grand vide de
quiétude, avant que mon cœur ne se gonfle d'espoir et de joie (comme
maintenant, alors que je le revis !). On est donc repartis au trot, au
milieu d'une végétation montagnarde magnifique. Un peu plus loin, on
rencontre un nouveau défi : traverser une chênaie nouvellement
replantée. Mission : éviter que les chevaux ne broutent les précieuses
pousses ! Bon, le premier arbre a fait les frais d'Isa, mais il faut
dire qu'elle n'a eu qu'à ouvrir la bouche, les arbres étaient tellement
serrés que la branche est venue (presque) toute seule entre ses dents.
Alors, je retends mes rênes, je lui réécarte la tête, et re-"Non !", et
tout le reste de la traversée s'est très bien passé. Un peu plus loin,
nouveau terrain, très pentu. Fabrice nous explique qu'il faut se
pencher
un peu en arrière (et pas se coucher limite sur la
croupe du cheval, comme on apprend en tourisme équestre), mais surtout,
toujours rester à la sangle. Les chevaux n'étant pas ferrés, il
risquent de rechercher les bas-côtés, plus confortables. Nous allons
devoir diriger notre cheval, de sorte qu'on se prenne le moins possible
de branches dans la figure,
donc, aller vers le bout des branches,
plus souple. Et dernière chose : ne jamais attraper une branche et,
pensant bien faire, la tenir pour les autres. Parce que, forcément, ça
peut pas marcher !
On commence la descente, très très caillouteuse. Je laisse faire Isa,
j'évite de la pousser, surtout que je vois Nelfe, devant, qui dérape, à
cause de ses fers. Je me contente de la diriger. Et c'est là que j'ai
aimé ma bombe !
J'ai été obligée d'en porter une, parce que je n'ai pas 18ans, mais je
vous jure que ça ma servi pour les branches basses ! Le dénivelé se
calme, mais j'ai pris du retard, du fait de notre prudence à toutes les
deux ! Alors, c'est un sublime trot qui commence dans les bois jusqu'au
groupe !
Maintenant, on passe à la montée ! Idem, même consignes, sauf que,
toujours contrairement à ce qu'on apprend en tourisme équestre, on ne
doit pas se pencher sur l'encolure, jusqu'à avoir le nez dans les
crins, sinon le cheval aura tout notre poids sur l'avant-main, et ça ne
l'aidera pas. Alors, le truc, c'est de se lever et de s'incliner un
peu, et toujours, de rester à la sangle. Alors, là, c'était plus
sportif ! Plus question de laisser aller Isa. Je dois l'encourager et
c'est pratique, puisque je suis debout un peu penchée en avant et donc,
près de son oreille !
Et cela, tout en évitant les branches !
Mais nous avons bien vite été récompensés de nos efforts. On arrive
au-dessus de la côte, on sort de la forêt, et là...Un paysage comme je
n'en ai jamais vu (le fait d'être sur le dos d'Isa a peut-être un peu
aidé cette impression !
) : Imaginez : vous êtes à cheval, vous débouchez d'une forêt obscure
ou vous avez manquer vous vautrer et où vous avez pris des branches
dans la figure (je force un peu le trait !
), et vous vous trouvez au-dessus de coteaux de vignes baignés par le
soleil couchant, avec en fond, les montagnes du Vercors qui dégagent
une énergie quasi-mystique...
On a donc longé le coteau de vigne, lentement, pour ce qui nous concerne !
Et j'ai remarqué quelque chose d'assez impressionnant : Nelfe (la
jument juste devant nous), pour aborder des pentes raides et descendre
plus vite, se mettait automatiquement en crabe !
C'est un moyen très efficace, il est vrai ! Mais je me demande si c'est
naturel ou si elle a acquit cette technique par le dressage, car je ne
pense pas que ce soit son cavalier novice qui le lui demandait (c'était
sa première fois)...A votre avis ? (J'ai su après que Nelfe est une
ancienne jument de propriétaire). Une fois revenus en forêt, on aborde
la dernière étape : les branches très basses (à croire qu'on avait eu
jusque que là que des branches basses !
). En tourisme équestre, on apprend, pour les passer, à se pencher le
long de l'avant-main du cheval, comme si on voulait ramasser quelque
chose par terre, sauf que, comme l'a dit Fabrice : "Vous avez rien à
chercher par terre, et ça vous empêche de voir devant vous". Donc,
solution : se pencher sur l'encolure, de manière à voir les branches
etle chemin. Inutile de vous dire que ma bombe m'a encore été été bien
utile ! Même plus que ça : A un moment, j'ai mal calculé, et j'ai pris
une
grosse branche bien rigide !
Et j'ai pu imaginer, vu le mal de tête que j'ai eu pendant plusieurs
heures après, que j'aurais été assommée, si je n'avais pas eu de bombe
! Bon, en même temps, si je me la suis prise, c'est que je ne l'avais
pas vue
à cause de la visière de ma bombe ! Donc, peut-être que
si je n'en avais pas eu, je l'aurais évitée ! Bon, j'étais en
débardeur, et je me suis aussi fait griffer le dos ! Mais c'est le pris
à payer !
Et pour la dernière fois, on débouche de la forêt, pour revenir le long
du champ. Cette fois, la lumière rouge du crépuscule l'inondait, c'est
une lumière inimaginable ailleurs que dans le sud...Et nous voila
partis pour un ultime galop...Cette fois, Isa démarre bien, et,
l'émotion passée, je peux prendre la meilleure position possible, ce
qui a fait de ces courts instants, un galop magique. Tout d'un coup, on
entend Fabrice dire : "Arrêtez-vous ! Arrêtez-vous !" On s'arrête, et
on réalise que Nelfe a commencé à embarquer son cavalier. Elle était
dans le champ, à un ou deux mètres de nous, les quatre pieds plantés
dans le sol, et son cavalier soufflait un bon coup, comme moi quand Isa
a couiné !
Je pense qu'il était dans le même état d'esprit que moi à ce moment-là
: surpris, mais pas effrayé, parce que Fabrice avait réussi le tour de
force de donner à chacun le cheval qui lui correspondait parfaitement.
On a su après que Nelfe avait embarqué suite à un excès de confiance :
détendu, son cavalier avait posé les rênes sur l'encolure de Nelfe et
regardait le paysage. Mais Nelfe, un peu plus sensible que les autres,
avait brusquement bifurqué vers le champ. Bon, elle n'est vraiment pas
allée
loin, mais après ça, on est rentrés pépères ! Sur le chemin du retour,
le cavalier de Nelfe (vraiment désolée, je n'ai pas retenu son prénom !
) se retourne pour me demander si c'était ma première fois...Gloups
...J'ai répondu que j'avais obtenu mon galop 1 étant petite et que
j'avais arrêté par manque de temps. Lui m'a dit que c'était la toute
première fois qu'il montait, mais qu'il était habitué aux chevaux parce
qu'il aidait souvent un ami maréchal-ferrant. Là-dessus, nous sommes
revenus sur la route. Ce coup-ci, pas de problème pour traverser. On
arrive à l'entrée du centre, on déchausse, on met pied à terre (whouuu,
j'ai les jambes en coton !
), et on mène les chevaux à l'attache. C'est là qu'on s'aperçoit qu'on
s'est baladés deux heures au lieu d'une ! Sur le chemin, en passant
devant les prés, Isa salue son copain gris (j'ai oublié de dire que ces
deux-là n'ont pas arrêté de se faire la causette depuis qu'Isa est
sortie du pré
). On desselle (c'est tout chaud !
), et on porte le tout dans la sellerie, avec force blagues et éclats de rire.
Ensuite,
Fabrice nous montre un coin où sont rangés des morceaux de pain dur
pour les chevaux. Inutile de vous dire qu'ils ont tous reçu leur du (en
caresses et en friandises !)
C'est là que j'ai pris les photos. Fabrice faisait le tour pour
recueillir nos impressions. J'ai juste dit : "Génial !" avec un sourire
d'une oreille à l'autre (que les mots peuvent êtres dérisoires face à
nos émotions !) J'avais pas envie de partir !
On était si bien, hors du temps et de l'espace, dans les montagnes du Vercors !
Je suis allée boire un coup à la voiture, et quand je suis revenue,
j'ai vu mes parents qui discutaient avec Fabrice. Il y a eu un silence
quand je suis arrivée. Il m'en fallait pas plus pour comprendre que mes
parents venaient de lui raconter mon histoire. Pour briser le silence,
Fabrice m'a dit (je l'entends et je le vois encore) :
"_Tu sais, il y a des adultes qui feraient mieux de ne pas faire ce qu'ils font...Surtout avec des enfants"
_Oh, ça passe avec le temps
_ Oui mais tu sais, parfois, on met ça sous le mouchoir et dès qu'on
essaie, ça revient comme si c'était hier. (Ca, je le savais). En tout
cas, tu as du potentiel. C'est très bien, surtout après le choc que tu
as eu..."
Je
l'ai regardé un moment. Je n'avais jamais envisagé ça comme un choc,
mais plutôt comme une grande déchirure. Enfin, comme je n'aime pas trop
parler en général, je n'ai rien dit, je l'ai juste remercié avec les
yeux...Je ne sais plus comment on s'est quittés, si on s'est dit
d'autres choses, je me revois juste dans la voiture, essayant
d'apercevoir une dernière fois les chevaux. Mais le soleil rouge éclate
derrière l'écurie et m'empêche de voir quoi que ce soit...
Whaaaaaaa ! Les pavééééés ! Je m'en étais même pas aperçue !
Vraiment désolée à ceux qui n'ont pas eu le courage de tout lire (et je les comprends) et aussi pour les double-posts!
Et un immense merci et félicitations à ceux qui sont allés au bout !